Deuxième - Second

De MultiGram

Pour désigner un objet de rang 2, le français dispose de deux adjectifs, deuxième et second, réputés se distribuer les valeurs suivantes :

  • Le deuxième d’une série de plus de deux, réelle ou potentielle, est désigné à l’aide de l’adjectif deuxième ;
  • Le deuxième d’une série de deux (c’est-à-dire le dernier de deux) est désigné à l’aide de l’adjectif second.

Vue sous cet angle, la différence entre les deux phrases suivantes

A. C’est la deuxième fois que tu renverses ta tasse de café.
B. C’est la seconde fois que tu renverses ta tasse de café.

pourrait s’interpréter comme suit :

  • dans A, la série est ouverte, il peut y avoir une troisième occurrence, même si elle n’est pas souhaitée ;
  • dans B, la série est fermée, on n’envisage pas la possibilité d’une troisième occurrence.

Toutefois, l’usage est loin de cautionner cette distribution des deux adjectifs décrite par les grammairiens. Qu’on en juge par deux exemples issus du contexte universitaire belge :

  1. L’année universitaire est en Belgique divisée en trois périodes de quatre mois appelés quadrimestres ; la deuxième de ces périodes est officiellement appelée second quadrimestre, bien qu’il y en ait invariablement un troisième qui suit ;
  2. L’année universitaire compte deux sessions d’examen, la deuxième étant une session de rattrapage ; la session de rattrapage est indifféremment appelée seconde session ou deuxième session, alors qu’aucune troisième session n’est jamais organisée ni même autorisée.

L'usage courant cautionne l'usage universitaire : le fait de dire

C’est la deuxième rue à droite.

plutôt que

C’est la seconde rue à droite.

ne présume pas nécessairement de l’existence d’une troisième rue à droite.

Pour l’Académie française, l’unique différence d’emploi entre ces deux mots est que second appartient à la langue soignée et que seul deuxième entre dans la formation des ordinaux complexes (vingt-deuxième, etc.). Pourtant, même en dehors des cas signalés par l’Académie, les deux mots ne sont pas librement interchangeables. En effet, dans l'usage, sans différence de registre :

  • le deuxième est celui qui est compté après le premier, ce premier étant toujours présent et offrant un point de comparaison avec ceux qui suivent → un polygame parlera ainsi plus volontiers de sa deuxième épouse, même s’il n’en a pas davantage que deux ;
  • le second est celui qui vient après le premier, mais s’en distingue en présentant des caractéristiques propres → un veuf qui vient de se remarier parlera plus volontiers de sa seconde épouse (celle qui remplace la première, décédée), ce qui n’exclut pas un troisième mariage ultérieur.

Vue sous ce nouvel angle, la différence entre les deux phrases suivantes :

A. C’est la deuxième fois que tu renverses ta tasse de café.
B. C’est la seconde fois que tu renverses ta tasse de café.

s’interprètera de la manière suivante :

  • dans A, ce qui est mis en avant c’est l’addition des occurrences de l’évènement « renverser sa tasse de café » – c’est l’accumulation qui est soulignée ;
  • dans B, chaque occurrence de l’évènement est considérée indépendamment des autres – c’est la répétition qui est soulignée.