Injonction

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L’injonction est une des trois modalités de l’énonciation, avec l’assertion et l’interrogation. Elle vise, pour le locuteur, à faire agir ou réagir un destinataire :

L'impératif est la principale manifestation de l’injonction :

Apportez-moi l’addition.
Faites attention.

Peuvent également exprimer l’injonction :

  • le verbe à l’indicatif futur (simple ou périphrastique) :
Je paierai avec ma carte de crédit.
Vous allez renverser ce verre sur ma robe.
Vous ajouterez ensuite le sucre et le beurre.
Que le dernier ferme la porte.
Ne pas déposer de sac sur les tablettes de fenêtre.
  • une périphrase verbale :
Il est strictement interdit de vendre des boissons alcoolisées aux mineurs d’âge.
  • le nom :
Toilettes. 
(fléchage au pied d'un escalier, par exemple)
Accès réservé au personnel.
  • l’adjectif :
Réservé. 
(sur la table d’un restaurant ≈ Ne vous asseyez pas là)
Vendu. 
(sur un tableau dans une galerie)
  • une phrase assertive :
« Une bière brassée avec savoir se consomme avec modération. » 
(≈ N’en abusez pas)
  • le non-verbal, notamment les panneaux routiers.

Contraintes sur la personne

L’injonction présente les plus grandes affinités avec la 2e personne :

Passe-moi mon porte-monnaie.

Elle est d’un usage assez limité à la 1re personne. Elle n’est toutefois pas exclue. Comparez

Agathe, paie les jus ; je paie les boissons chaudes ; toi, Jules, supplée le pourboire.

Les formules d’encouragement, qui relèvent de l’injonction, sont intéressantes à observer, puisqu’un locuteur peut s’encourager lui-même à la 1re, à la 2e ou à la 3e personne :

Allez, je me lance !

L’injonction est d’un usage assez limité à la 3e personne. Elle n’est toutefois pas davantage exclue qu’à la 1re personne. Comparez :

Agathe, paie les jus ; je paie les boissons chaudes ; Jules suppléera le pourboire.
(supposant que Jules est momentanément absent… ou qu’il est présent mais qu’on ne lui demande pas son avis).

Mais on peut à l’égard d’une personne absente formuler des souhaits, qui relèvent comme les encouragements, de l’injonction :

Qu’il aille au diable avec ses cacahuètes !

Cette restriction sur les personnes explique le caractère défectif du « mode impératif », qui n’est jamais qu’un emploi spécialisé des formes de la 2e personne de l’indicatif présent (voire du subjonctif, pour certains auxiliaires).

Contraintes sur l’action

Tous les verbes ne sont pas également susceptibles de s’accommoder de la modalité injonctive. Les verbes d’aspect dynamique (verbes dits « d’action ») sont les plus susceptibles d’emplois injonctifs :

Allez me chercher un verre propre.
Sortez immédiatement.

En revanche, les verbes qui expriment un procès dont la réalisation ne dépend pas de la volonté d’un agent s’y prêtent beaucoup moins ou nécessitent une contextualisation spécifique. Voyez, avec le verbe trouver ; comparez :

? Jules, trouve un marteau !

et

Jules, trouve-moi un autre marteau, celui-ci est trop lourd.

Les verbes d’aspect statique ne sont pas incompatibles avec la modalité injonctive, pourvu que la réalisation ne dépende pas de la volonté de l’agent :

Comprenez-moi bien.

Sur ce point, comparez :

Écoute ce chien qui aboie tout le temps.
? Entends ce chien qui aboie tout le temps.

L’écoute suppose une participation active, alors que l’entente suppose que soient réunies des conditions qui ne dépendent pas de l’agent (obtenir le silence, faire abstraction du bruit, se concentrer…).

Pour les mêmes raisons, les phrases à la voix passive s’accommodent moins bien de la modalité injonctive que les phrases à la voix active, surtout lorsque le complément d’agent est exprimé (il y a alors conflit entre l’agent et la modalité qui vise à faire agent le destinataire du message). Comparez :

Servez la table d’à côté avant la mienne.
? Soyez servis avant moi.
? Soyez servis par le garçon avant moi.

Voir aussi Phrase injonctive